2010 La Vérité sur Jack (You Don’t Know Jack) (téléfilm)

J’ai commencé ce téléfilm en étant totalement en territoire vierge : je n’en avais jamais entendu parler, et je ne savais pas quel en était le sujet (je dois dire que cette situation m’arrive très, très rarement et est très agréable).

Passé le premier étonnement face à la physionomie d’Al (cheveux blancs et courts, look de papy, il joue vraiment un homme âgé), le film est une bonne surprise, il paraît totalement être un film de cinéma, et c’est un peu injuste qu’il soit un téléfilm. Bien que le sujet ne soit pas des plus gais (il s’agit d’une longue suite de suicides assistés), je le recommande à quiconque a aimé Dark Waters et Spotlight (tous les deux avec Mark Ruffalo), et Scandale (avec Charlize Theron), car c’est un peu le même rythme, la même ambiance (du cinéma américain — de type film-dossier basé sur une histoire vraie — bien ficelé et très pro), et ce téléfilm n’a pas à rougir de la comparaison avec ces trois succès du grand écran.

Al est évidemment le point fort : son jeu toujours aussi inventif, son phrasé tellement original, riche dans ses nuances et fantastique à écouter (y compris sans regarder l’écran), son personnage au physique passe-partout mais charismatique, provocateur et obstiné, assez secret sur lui-même et l’origine de ses motivations tout en étant prolixe et excellent orateur lorsqu’il doit défendre sa cause…

Pour l’anecdote, Al joue ici pour la deuxième fois de sa carrière (après Avec les compliments de l’auteur) un homme d’origine arménienne (il est vrai que son physique 100 % italien s’y prête totalement). Et, rareté dans sa longue carrière, la séquence où il est au tribunal en costume du XVIIIe siècle démontre à quel point il aurait pu être un très bon acteur comique s’il avait pu hériter de personnages joués par Gene Wilder ou autres (je pense en particulier à Tootsie, qui est la Rolls du rôle comique pour acteur habituellement dans un registre dramatique). Certaines scènes dans Scarface aussi (étonnamment) laissent incroyablement présager à quel point il aurait pu être drôle à l’écran. Ce sera pour une autre vie, hélas. Comme Al a publiquement dit qu’il aurait souhaité être un acteur comique, c’est d’autant plus un regret.

Par ailleurs, un autre point fort de ce film est bien plus inhabituel : absolument tous les autres rôles sont très bien écrits et très bien joués (c’est rare, on peut le dire), que ce soient les nombreux petits rôles ou les principaux seconds rôles. La sœur, à la fois généreuse meilleure amie et souffre-douleur ; l’avocat roublard et fort en gueule (l’acteur a de faux airs de Boris Johnson, c’est amusant) (ah, incroyable, cet acteur, Danny Huston, est le fils du grand réalisateur John Huston, je ne m’en serais pas douté) ; un personnage féminin tout en réserve, sensible et un peu effacé, incarné par Susan Sarandon ; et le fidèle assistant/meilleur ami, qui a la carrure atypique de John Goodman (séquence émotion pour les fans d’Al, puisqu’ils formaient un excellent duo de collègues à l’écran vingt et un ans plus tôt dans Mélodie pour un meurtre, LE film du come-back d’Al dans les années 80). (Ah, une autre surprise, je regarde la fiche Wikipédia de John Goodman et je découvre qu’il fête ses soixante et onze ans aujourd’hui exactement.)